Le cerf-volant
Le cerf-volant,
(au pluriel: des cerfs-volants)
est un engin volant plus lourd que l'air, c'est-à-dire un aérodyne, habituellement sans passager et manœuvré ou simplement rattaché au sol à l'aide d'un ou plusieurs fils. Il est généralement fabriqué avec de la toile et éventuellement une armature rigide.
L'étymologie du mot ne fait aujourd'hui plus de doute : d'après le dictionnaire de l'Académie française et le dictionnaire de la langue des XIXe et XXe siècles publié par le CNRS en 1977, le mot « cerf-volant » (1669) viendrait de serp-volante, serp étant un mot féminin en ancien français pour désigner un serpent. Le mot serp est d'origine méridionale. En occitan, cerf-volant se dit sèrp-volaira et désigne bien un serpent-volant. Pierre Augustin Boissier de Sauvages (1710-1795) dans son Dictionnaire languedocien-françois donne même deux variantes ser ou serp pour désigner le serpent.
En breton (sarpant-nij), en wallon (dragon) mais aussi dans la plupart des langues d'Europe, on retrouve la même étymologie ou appellation pour le cerf-volant : « dragon » ou « serpent volant ».
Cette appellation peut évoquer les textes et légendes mentionnant des serpents ailés et des dragons volants que l'on retrouve dans la Bible[1], dans des mythologies de différentes civilisations et dans les légendes en France jusqu'au XVIIIe siècle mais elle se rapporte surtout très directement à la forme des premiers cerfs-volants introduits ou représentés en Europe : avec leurs têtes féroces et leur longues queues ils figuraient effectivement des dragons ou serpents volants (voir la première illustration en Europe figurant un cerf-volant dans De Nobilitatibus de Walter de Milemete en 1326, et la première description écrite, dans Bellifortis de Konrad Kyeser en 1405, dans Kites, an Historical survey de Clive Hart, 1967.
Voici une description amusante due à François de Belleforest (1530-1583), d'un étrange dragon qui survola Paris le 17 février 1579 : « Il estait de merveilleuse grandeur ayant […] environ dix brasses de longueur […] avec quelques pieds et une grosse teste, ou deux, car lorsqu'il se retournait, ce qui estoit souvent, il paraissoit avoir deux testes, ayant une queue fort longue laquelle ondoyoit au vent […] les ailes ayant fort grandes et membraneuses […] Mon opinion n'est autre, sinon que sa peau est partie de la boutique d'un marchend de soye (qui est un léger taffetas) et puis, par quelque bon rieur, artificiellement accommodée en forme de dragon (chose toutefois qui ne se devroit tollérer) et porté au haut de quelque tour, puis envoyé au vent estant tousjours tenu d'un petit cordeau […] par l'artisan ou maistre de telle sottise, est faite pour aguerrir un simple peuple qui ne faut à dire que c'est un dragon comme je l'ai ouy de plusieurs : et perce, j'ai voulu escrire ce petit discours pour les en oster d'avoir. » Belle-Forest décrit bien là un cerf-volant de tissu en forme de dragon ailé, et on notera la mention de cette « queue fort longue ondoyant au vent », qui nous renvoie encore au serpent volant.
Le mot serp ayant disparu de la langue française, il a été alors transcrit phonétiquement, mais de façon erronée, dans « cerf-volant », les mots sèrp et cerf se prononçant de la même façon. Cette transcription n'a pas de rapport avec le cerf, le mammifère, même s'il avait une symbolique très forte au Moyen Âge (et a été parfois même représenté ailé, à la manière d'un Pégase). Elle proviendrait par contre d'un rapprochement avec le nom commun du lucane (insecte coléoptère) appelé « cerf-volant » du fait que les grandes mandibules du mâle ont une forme qui ressemble à celle des bois d'un cerf. Quelques dictionnaires étymologiques anciens ont pu ainsi attribuer par erreur l'origine du nom du jouet cerf-volant à cet insecte.
Historique :
D'anciens textes chinois font remonter l'origine du cerf-volant au IVe siècle av. J.‑C.. Toutefois ces textes étant très postérieurs à l'époque à laquelle ils font référence, il est impossible de savoir précisément où et quand a été inventé le premier cerf-volant. Il est très probablement l'invention d'un peuple de pêcheurs et navigateurs des îles d'Asie du Sud-Est, des populations expertes en l'art de fabriquer des fils, des voiles et d'utiliser le vent.
À l'origine, les Chinois en ont fait une utilisation essentiellement militaire ; le cerf-volant servait de signal, à porter des messages, à effrayer les ennemis ou évaluer des distances. Plusieurs récits légendaires chinois et japonais mentionnent des cerfs-volants porteurs d'hommes. Marco Polo rapporte comment les Chinois étaient capables de faire des cerfs-volants assez grands pour emporter un homme. Avant même le premier millénaire, on savait construire en Chine des cerfs-volants assez grands pour soulever un passager ; le premier homme à effectuer un vol ascensionnel l'a fait à bord d'un cerf-volant (ou bien suspendu en dessous) longtemps avant l'invention de la montgolfière.
Le cerf-volant pouvait avoir des fonctions magiques ou religieuses. En Thaïlande, au XVIIIe siècle, le cerf-volant du roi Narai restait en l'air toutes les nuits au moment du changement de mousson, phénomène associé aux fonctions cosmiques du souverain.
L'introduction du cerf-volant en occident remonte à la fin du XIIe siècle. À partir du XVIIIe siècle, son utilisation se développa dans les domaines militaires et scientifiques :
* vols humains (surtout aux alentours de la Première Guerre mondiale, pour l'observation des lignes ennemies)
* photographie aérienne (photo cervolisme)
* météorologie
* sauvetage en mer
* transmission radio
* traction de véhicules et d'embarcations
L'expérience de l'Écossais Alexander Wilson réalisée en 1749, utilisant un train cerf-volant comme un outil météorologique pour mesurer les variations de températures à différentes altitudes, est considérée comme la première application scientifique du cerf-volant.
Composés de panneaux verticaux et horizontaux afin de stabiliser le vol, les cerfs-volants en forme de caisse, développés par Lawrence Hargrave à la toute fin du XIXe siècle, ont inspiré les premiers avions. Ses recherches avec les cerfs-volants lui ont permis de découvrir et utiliser l'effet de portance induit par un profil d'aile courbe. Peu après, les frères Wright ont eux-mêmes développé et testé leur prototype d'avion à aile déformable sous la forme d'un cerf-volant.
Fonctionnement :
Le cerf-volant s'élève et tient en l'air grâce aux forces aérodynamiques que le vent exerce sur sa voilure.
Tous les cerfs-volants utilisent le même principe que celui d'une aile d'avion, c'est-à-dire la portance créée par la vitesse de l'écoulement de l'air sur une surface plane ou cambrée. En vol stationnaire, les forces aérodynamiques (portance et traînée), le poids du cerf-volant et la force de tension du fil de retenue s'équilibrent.
Un cerf-volant peut dépasser la verticale sur son élan, mais sa ou ses lignes sont toujours en arrière de la perpendiculaire du vent. Il peut se déplacer beaucoup plus vite que le vent et plus il va vite plus il tire en général.
La voilure est habituellement maintenue oblique par rapport au vent selon un angle précis donné par le bridage, c'est-à-dire par des fils en « V » maintenant l'avant et l'arrière de l'appareil.
Un cerf-volant plat, non pilotable, doit être stabilisé s'il a tendance à s'incliner ou tournoyer lorsque le vent forcit. On peut pour cela :
* lui donner du dièdre, c'est-à-dire un léger angle en V entre les ailes, ou bien le cintrer dans le sens de la largeur (on arque la baguette transversale en tendant un fil entre ses deux extrémités) ; dès que l'appareil s'incline d'un côté, l'aile la plus basse offre une plus grande surface exposée au vent, ce qui tend à ramener l'appareil à sa position d'équilibre ;
* le doter d'une queue, éventuellement lestée à son extrémité ;
* lui ajouter des panneaux verticaux, ayant rôle de dérives.
Les cerfs-volants pilotables fonctionnent comme deux cerfs-volants côte-à-côte. En tirant le fil d'un côté, le cerf-volant se met en virage. Les cerfs-volants pilotables à quatre fils se comportent aussi comme deux cerfs-volants côte-à-côte, mais le pilote peut agir sur l'angle de bridage des deux demi-ailes, ce qui fait qu'une aile peut, par exemple, avancer pendant que l'autre recule, produisant un mouvement de rotation, ou les deux ailes avoir une incidence neutre, permettant le vol stationnaire, ou encore une incidence négative, autorisant la marche arrière.
Source http://fr.wikipedia.org/wiki/Cerf-volant